Une représentation de la vie, voilà comment Nikita Khroutchev définissait le théâtre.
Il est courageux de s’y rendre en hiver ; en effet, vous garderez dans une atmosphère confinée et surchauffée le manteau sur les genoux repliés ; l’abandonner au vestiaire vous condamne après la représentation à faire la même queue qu’à la rare caisse de sécurité sociale du quartier pour tenter de ranimer votre vieille carte vitale !
Cette dernière pourrait bien servir le lendemain pour consulter votre toubib afin de soulager un torticolis vicieux contracté en vous positionnant tantôt à la gauche tantôt à la droite de l’épaisse nuque du voisin obèse ou géant assis devant vous.
La solution existe : initier une pétition pour reprogrammer à la télé l’antique émission de Pierre Sabbagh “ Au théâtre ce soir“ diffusée dans les années 70-80 en alternance entre les première et deuxième chaines de feu l’ORTF.
Les pièces enregistrées soit à Edouard-VII soit au Marigny se terminaient après les salutations des acteurs au public par le célèbre : « les décors sont de Roger Harth et les costumes de Donald Cardwell ».
Parmi les pièces les plus fameuses on se souvient d’entre autres : “Noix de coco“ de Marcel Achard, de “Madame Sans Gêne“ de Victorien Sardou, de “Folle Amanda “ de Barillet et Grédy, de “La Facture “ de Françoise Dorin et surtout les comédies de Georges Feydeau : “Le Dindon “,“ La Main passe » ,“Un fil à la patte “ou “La puce à l’oreille“.
Le rire était notre hebdomadaire, c’était un rayon lumineux qui éclairait nos soirées, il était selon le langage théâtral l’obstacle surmonté absurde, fou, corrosif et parfois cruel… la vie.
Néanmoins la mise en scène et les dialogues jouissifs faisaient un peu d’ombre aux décors et costumes des ci-nommés Harth et Caldwell !
Ces derniers ne pouvaient dans mon esprit concurrencer ceux du fondateur à la toute fin du 19e siècle en Russie du Mir iskousstva (Le Monde de l’Art), Léon Bakst qui fit tant pour la nouveauté et qualité des décors et costumes des ballets russes amenés à Paris par Serge de Diaghilev et ses nombreux danseurs et chorégraphes dont Balanchine et Nijinsky .
Et s’il me fallait décerner un oscar, je n’hésiterais pas à l’attribuer à ceux que Bakst produisit pour Schéhérazade, le fameux ballet de Michel Fokine d’après le poème symphonique de Rimski-Korsakov.
Décor de théâtre= décor de la vie !
Rideau.