Viendra- t-il dans un instant ou bien le lendemain, est-ce le bon jour, le bon endroit ? Tout le monde l’ignore, surtout Vladimir et Estragon et cependant il est omniprésent. Est-il déjà passé ? Que faire en attendant ? Pozzo et Lucky n’en savent pas davantage, pas plus que Beckett lui-même !
Pour George Kaplan, c’est pareil ; on ignore son visage et son lieu de résidence ; le séduisant Roger Thornhill (Cary Grant) est enlevé à sa place et séquestré par un certain Philip Vandamm (James Mason) qui est persuadé d’avoir enlevé le chimérique Kaplan !
Ne nous posons pas trop de questions, on risquerait fort de s’attirer la Mort aux trousses et cela de North by Northwest ! Mais, si c’est pour finir par décrocher un attrayant plan de varappe sur le Mont Rushmore avec Eva Marie Saint, why not ?
Il ne fallait pas arriver à la bourre et louper le premier acte de la série Columbo pour tenter d’entrevoir Kate, la femme de l’inspecteur à la chevelure en bataille (Peter Falk), qui reçoit un appel de son mari et qu’on ne reverra plus jamais dans les épisodes suivants mais que l’hôte trapu du célèbre imperméable beige évoquera en permanence !
Godot, Kaplan, madame Columbo, voilà trois célèbres arlésiennes**qui sont toutefois moins fantomatiques que l’homme noir de la société américaine (“Disons que je m’appelle l’Ours Jack“) qui vit depuis des siècles sous terre, underground, caché dans l’obscurité de sa caverne, écoutant du blues et “ qui sait si, sur les fréquences basses, il ne parle pas pour vous ? “ Vous avez là bien sûr reconnu le héros d’un des plus grands romans américains de l’après -guerre : “ Invisible Man“ de Ralph Ellison (le seul ouvrage publié de son vivant).
Et visiblement j’ai bien du mal à conclure ce délire insaisissable !
*allusion effrontée à la traduction française du roman cité ci-dessus : “ Homme invisible, pour qui chantes –tu ? “
** personnage de fiction qui est mentionné sans jamais apparaitre en chair et en os ; terme tiré de L’Arlésienne, une nouvelle des Lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet.